Souvenirs de mon Moulin (1)
Nous franchîmes les portes du domaine, et elle me dit : "Cela n'a pas changé depuis notre dernière venue en 1988, avec Papa". Notre expérience de ce 19 juillet 2015 fut surprenante, à tous les égards. Les récits de mes parents sur ce lieu ont générés un paradigme inébranlable. Il est bien là le problème. Comment espérer trouver son assiette identique, 25 ans après ? Alan-Fournier en a pourtant déjà fait l’amère constat. Pour ma part il s'agissait d'une première. Bien qu'accoutumé à ce genre d'établissement, j'ai été tiraillé entre douceur et amertume, au sens propre, comme au figuré. J'ai su tout de suite, en lisant les intitulés, que mon paradigme s'écroulait. Je n'ai pas osé le dire. Le restaurant a évolué avec son temps. J'ai opté pour le Menu Gourmand. La première entrée n'a pas créé l'effet escompté à la lecture de son intitulé. Un morceau de tomate, avec beaucoup de pépins. Sur le plan gustatif, j'ai été agréablement surpris des effets produits sur mon palais par le bouillon japonais. De nouvelles saveurs s'y dégageaient encore deux minutes après la déglutition. Très agréable. Par contre, force est de constater que je ne m'habitue pas à cette méthode qui consisté à vider le bouillon, de façon très violente, devant le client, comme pour vouloir lui signifier sa soumission à la volonté du Chef. Un peu de douceur SVP! De la poésie, du calme. Déçu aussi par la Langoustine, insipide, servie avec un pesto, qui, une fois raclé de tout son contenu, tient sur la pointe d'une fourchette. Je n'ai pas pu en inventorier les ingrédients ! Le minimalisme est une tendance de la Gastronomie Française moderne, et à mon sens, son talon d’Achille. Mais c'est un autre débat. La déception de ma mère et, surtout, son insistance- parfaitement inutile en incongrue en milieu de repas - à vouloir le signifier à la Direction, ont quelque peu fait chavirer mon analyse. Mais au fond, elle a peut-être bien fait !